Le mois de septembre, c’est la rentrée pour tout le monde. On parle beaucoup de celles des enfants mais peut-être un peu moins de celle des étudiants. Aujourd’hui, je voulais adresser mon article aux étudiants en Architecture (mais pas que), ou à ceux qui souhaiteraient le devenir. En écrivant cet article, je me dis que peut-être cela aidera certains à moins s’inquiéter, prendre du recul et prendre confiance en eux. Le plus modestement possible, je vous livre quelques conseils basés sur mon expérience. Vous en ferez ce que vous voulez…
Lors de mon tout premier cours de Première Année à l’École d’Architecture, je me souviens que notre professeur nous avait déjà bien accueilli dans cet amphithéâtre :
« Vous êtes 600 admis, l’année prochaine, vous serez 300. 100 d’entre vous obtiendront leur Licence, puis 50 continueront en Master et 20 arriveront jusqu’au PFE*. Après, 10 passeront leur HMONP** et 5 l’obtiendront. Et puis peut-être, seulement peut-être, s’il a de la chance, 1 seul arrivera à ouvrir son agence à la fin. »
* Comprenez Projet de Fin d’Études.
** Comprenez Habilitation à la Maitrise d’Ouvrage en son Nom Propre.
Belle entrée en matière vous ne trouvez pas ? Eclatante d’optimisme et de bonnes ondes ! Dès ce premier jour, on nous met dans le bain de la compétition. Dans cet amphi, ce jour-là, on commence à regarder son voisin et on se demande s’il sera l’heureux élu, ou si ce sera nous… Ou même si, finalement, on arrivera à passer la première année !
Puis vous rencontrez rapidement d’autres professeurs ou d’autres élèves, qui prendront un malin plaisir à vous faire flipper, dans l’espoir d’éliminer, déjà, certains de leurs concurrents, simplement en jouant sur le côté psychologique :
« Ça va être horrible ! Tu ne vas plus pouvoir voir ta famille régulièrement tellement il y a du travail ! Tu es déjà en couple ? Je peux te dire que ça ne tiendra pas ! Surtout s’il/elle n’est pas en Archi lui/elle aussi ! Il/elle ne pourra pas comprendre. »
« Tu vas perdre beaucoup de poids parce que tu n’auras plus le temps de te nourrir. »
Ou alors :
« Tu vas probablement prendre 20 kilos à force de manger des pâtes carbo et de ne pas pouvoir aller au sport. Parce que oui, le sport, tu oublies c’est évident ! Tu n’auras pas le temps ! »
Ça donne le ton. En tout cas, celui qu’on veut que vous ayez à l’esprit. On vous dira que tous ces sacrifices sont nécessaires pour espérer atteindre le graal de devenir architecte à son compte. Alors vous, vous vous mettez à douter, à flipper un peu, puis beaucoup jusqu’à peut-être vous laisser déstabiliser.
Esprit de compétition bonjour !
De mon point de vue, on ne devient pas bon en descendant les autres. On est bon parce qu’on est bon et qu’on travaille, tout simplement. Et le but n’est pas d’être le seul à arriver au bout, mais simplement d’arriver au bout (si c’est ce que vous souhaitez bien sûr). Et si vous êtes 10 à y arriver au lieu du seul annoncé, et bien tant mieux ! Vous ne serez pas seul à fêter votre diplôme !
Je serai peut-être la seule à vous le dire mais oui, vous pouvez continuer une activité sportive. Oui, votre couple peut tenir le coup et oui, vous pourrez voir votre famille ou amis. Ca a fonctionné pour moi, et je suis arrivée au bout. Mon secret : l’ORGANISATION. Voici comment faire :
1- Apprenez à vous connaître et à gérer vos temps de travail :
Personnellement, je sais que je suis plus efficace le matin pour travailler que le soir. Mon cerveau est tel que lorsque la nuit tombe, il a du mal à se concentrer, le bougre ! Pas facile en hiver, je vous l’accorde. Mais du coup, je sais que je préfère bosser un samedi matin, qu’un mercredi soir. Idéalement bien sûr. Pour vous ce sera peut-être l’inverse mais peu importe. Apprenez à vous connaitre, à comprendre les moments dans lesquels vous êtes le plus efficace, tout en restant un minimum flexible et adaptable. Evidemment qu’il m’est arrivé de travailler un mercredi soir. Mais essayez de vous bloquer les moments qui vous seront les plus bénéfiques.
Ensuite, essayez de déterminer le temps passé à chaque type de tâche (rédiger une dissertation, réaliser une maquette, prendre le temps de la réflexion autour d’un nouveau projet…). On n’est pas à la minute hein !
Lorsque vous aurez une date butoir pour rendre un projet (plan, coupes, façades, maquettes, rendu 3D, …), nous n’aurez plus qu’à élaborer un rétroplanning ou une To Do List en vous basant sur le temps de production de vos divers documents.
Exemple : Une maquette : 2 jours. Un plan : 2 jours. Les coupes et façades : 1 jour. La 3D : 2 jours. Avec ça, vous savez qu’il faut démarrer la production 7 jours avant la date de rendu.
2- Savoir s’arrêter :
Le précédent conseil est directement lié à celui-là : Le problème en architecture, comme en peinture d’ailleurs, est de savoir s‘arrêter. C’est précisément ce point qui nous fait perdre du temps.
Oui, vous pourrez avoir des bonnes idées jusqu’au dernier moment. Et probablement même après le rendu et très probablement des années plus tard. C’est normal. L’architecture est un domaine créatif qui fait appel à l’imagination. L’imagination n’a pas de limite. Elle peut être contrainte mais peut se développer indéfiniment dans ce cadre donné.
Sauf qu’à un moment, il faut savoir dire stop à votre cerveau. Si vous avez défini qu’il vous faut 7 jours de production avant une date de rendu, gardez en tête qu’il s’agit bien de production. A ce moment-là, la réflexion doit être terminée. Une semaine avant le rendu, on met le cerveau sur pause, et on bascule sur le mode action. Vous avez a priori eu du temps pour réfléchir avant. Là, ce n’est plus le moment !
3- Fixez-vous des moments pour vous
Je vous assure, se laisser des moments à soi ne sera pas perdu. JAMAIS. Une heure de sommeil ou de sport sera plus toujours efficace et utile pour votre cerveau qu’une heure de la sacro-sainte charrette. Croyez-moi ! Ne pas dormir ne vous apportera rien. Pire : vous ferez des choix dénués de logique ou vous deviendrez le plus maladroit des êtres humains tant vous êtes à bout. Quand vous finirez par tomber de sommeil sur votre bureau, vous n’entendrez pas votre réveil du matin, vous devrez courir après votre bus mais vous louperez le trottoir et vous détruirez la maquette que vous avez fabriquée toute la nuit, en vous étalant dessus ! (Je précise que c’est vraiment arrivé à une de mes copines).
Comme une heure de cours obligatoire, rendez obligatoire les moments que vous vous accordez. Faites de vraies nuits et accordez-vous des moments sans Architecture. Pour moi c’était minimum 1h30 de danse par semaine. Mais ça peut être un moment de lecture, de course à pied, de crochet ou de ping-pong, faites-vous plaisir ! Défoulez-vous, dormez, maintenez une bonne hygiène de vie, c’est ça qui vous fera tenir la distance.
Oui vous pouvez louper un cours de sport dans le semestre. J’ai dit 1 pas 50 ! Cependant, je vous promets que ces moments de défouloir et d’échange sont hyper énergisants. Privilégiez les cours de groupe, où vous tiserez des liens avec vos partenaires et qui vous rappelleront à l’ordre si vous ne venez pas !
Ça vous fera sortir la tête de l’eau parce qu’il faut bien sortir la tête de l’eau. Même les plus grands apnéistes remontent à la surface à un moment !
4- Savoir s’affranchir du regard des autres
C’est peut-être le conseil le moins évident à suivre. Dans le milieu de l’Architecture (et d’autres certainement aussi), la charrette est avant tout un phénomène de mode plus qu’un besoin réel. On se sociabilise en racontant que l’on est épuisé et on se congratule d’avoir tenu 1 semaine en ne dormant que 2h par nuit. Mesurer la profondeur des cernes ça rapproche !
Parce qu’on étudiant, on veut se faire des potes et pourquoi pas, plus tard, s’installer avec eux et monter une agence en commun. La grande amitié. Alors les nuits blanches, on les passe avec les amis et on crée du lien.
Sauf que voilà, la charrette, objectivement c’est mauvais pour la santé. Et la santé, on en a qu’une alors autant la bichonner !
Combien de fois on m’a dit, plus ou moins en rigolant, lorsque tout le monde se vantait de n’avoir dormi que 2h voire pas du tout, que je ne pouvais pas techniquement avoir terminé mon rendu à 21h la veille, avoir mangé un bon repas et avoir passé une bonne nuit de sommeil et d’être tout de même prête pour le rendu ce matin. Et ben si, et croyez-moi je ne suis pas Wonder Woman, loin de là. Mais je n’avais rien à prouver. Alors j’ai vite arrêté de prendre part à ce type de discussion pour savoir qui a la plus longue… nuit de sommeil. Finalement les grandes bouches on s’en éloigne et on rencontre des personnes qui ne jugent pas et avec lesquelles on se sent plus à l’aise.
5- Séparez votre travail de votre personne
Pour ce dernier conseil, vous allez me dire qu’il faut être un peu schizophrène mais en réalité, cela va vraiment vous aider. Pendant vos études, vous allez rencontrer des professeurs avec lesquels ça ne fonctionnera pas ou des projets qui ne vous inspireront pas. Vos rendus ne seront peut-être pas géniaux à ce moment-là. Cela peut arriver à tout le monde. Mais voilà, vous allez devoir faire face à certaines critiques sur votre travail. Je répète, sur votre travail. En aucun cas, un projet loupé ne remet en cause votre intelligence, vos compétences ou votre sérieux, et surtout pas sur votre capacité à réussir dans ce métier. En aucun cas, un professeur ne devra dire que vous êtes nuls si votre projet n’est pas satisfaisant. Et en aucun cas, vous ne devrez conclure que vous ne valez rien si votre travail, ce jour-là n’est pas à la hauteur.
Votre travail peut être mauvais, vous non. C’est clair ?
Pardonnez-moi, j’ai été bavarde sur le coup ! Le but de mon article n’est absolument pas de vous miner le moral, de vous faire peur ou vous décourager. Au contraire, en suivant cette méthode, j’ai rencontré des personnes formidables lors de mes études et avec de l’organisation, je m’en suis plutôt très bien sortie, sans entrer dans des spirales infernales du manque de sommeil. Mon but est simplement de vous montrer qu’on peut le faire. Le mal-être en étude n’est pas une fatalité. Et puis dans le fond, vous n’avez rien à prouver à personne et vous n’avez pas à vous comparer aux autres. Surtout, prenez soin de vous, la santé on en a qu’une, ne la brûlez pas par les deux bouts dès vos études. Profitez de vos études et apprenez un maximum. Vous travaillez pour vous avant tout. Prenez le bon, rejetez le mauvais. C’est tout.
N’hésitez pas à partager avec moi vos expériences ou vos craintes. Je serai ravie d’échanger avec vous sur le sujet ! En tout cas, si vous avez réussi les sélections et que vous entrez en Ecole d’Architecture, félicitations, vous allez vous régaler !
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